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Photo du rédacteurJean-François Grard

Auteur à voix - Laurent Ruquier

Dernière mise à jour : 26 juil. 2021

Auteur à voix, un portrait entre écriture de texte, radio et volonté de faire rire les autres.


Le récit posté ci-dessous s'inspire librement de l'entretien mené par Isabelle avec Laurent Ruquier. Si vous désirez écouter cet entretien, vous pouvez le retrouver ici


Les récits de cette collection s'inspirent des entretiens passionnants menés par #IsabelleLayer dans son podcast 'Viser la lune', podcast que vous pouvez retrouver ici.


#ViserlaLune-Lepodcast vous offre des #interviewsinspirantes où des personnalités partagent, en toute intimité, les (més)aventures qu'elles ont vécues sur le chemin de leurs rêves.


Je remercie Isabelle de m'avoir donné l'autorisation de m'inspirer de ses entretiens.


J'aurais pu ne jamais voir le jour. Comme le disait souvent ma mère à ses amis : « S’il y avait eu la pilule, celui-là, il ne serait pas là. » Elle ne savait pas ce qu’elle disait mais ça a eu un impact important sur ma vie de poil à gratter.


J’étais le petit dernier de la famille. Il y avait en vérité une grande différence d'âge avec mes frères. Si bien que je n’ai pas grandi avec eux. Comme j’étais timide et introverti, je ne jouais pas non plus avec les enfants de mon âge. Personne ne me choisissait jamais dans leur équipe et je restais sur le banc.


J’ai rapidement compris que faire rire pouvait me permettre de prendre ma place. Et faire rire les autres, je l’avais en mon pouvoir. Depuis tout petit, je faisais le mariolle. J’en ai fait mon métier. J'imitais mon idole, mon modèle, Thierry Le Luron. Je passais mon temps à l’imiter, à redonner vie à ses voix.


Comme j’aimais la radio, je m’imaginais animateur radio. Dans ma chambre, le soir, je reproduisais les grilles des radios que j’écoutais, RTL, Europe 1, France Inter. Je faisais venir les invités et reconstruisais l’émission dans ma tête.


A 17 ans, j’ai tenté ma chance. J’ai envoyé une cassette à RTL, à l’occasion d’un concours qu’ils organisaient. Parmi les milliers de candidatures, ils en retenaient 10. Ma cassette les a séduit et j’ai pu passer à l’antenne un soir, après 23H. J’étais mauvais, mais j’ai, ce jour-là, chopé le virus de la radio et je n’ai jamais pu m’en débarrasser.


Les choses se sont faites petit à petit. A l’époque, il n’y avait ni réseaux sociaux, ni internet. C’était compliqué d’interpeller qui on voulait.


J’ai commencé sur de petites radios locales, au moment où les fréquences se sont libérées. Au début, quand j’envoyais ma candidature en mentionnant mon aventure sur RTL, je ne recevais aucune réponse. Je suis entré par la bande, grâce à un copain qui avait été embauché dans une petite radio et se souvenait de moi et de ma capacité à faire rire.


Malheureusement, l’aventure s'est rapidement terminée. La radio a été rachetée par un grand groupe et je ne correspondais pas à ce qu’ils cherchaient. Je n’avais ni la voix, ni le débit.


J’ai alors frappé à la porte d’une petite radio. J’y écrivais des chroniques sur l’actualité. Mon sens de la répartie plaisait. Mais seul ma famille pouvait m’entendre.

Ma tante m'a alors conseillé d’envoyer mes chroniques à Paris, à deux trois animateurs connus et reconnus. L’un deux m'a rappelé et je suis monté à Paris. Il mettait en place un spectacle dans un cabaret et voulais y intégrer l’un ou l’autre de mes textes, à l’humour plutôt noir. A la fin d’un de ses spectacles, il a eu l’élégance de me présenter et de me mentionner comme l’auteur de certains textes devant un parterre parisien qui était là pour l’écouter. C’est une porte qui s’ouvrait pour moi, et j’y glissais doucement le pied, pour qu’elle ne se referme pas tout aussi vite.


Le lendemain, j’ai contacté le directeur d’un cabaret parisien pour y faire un essai. J’y ai remplacé rapidement un des artistes à l’affiche. Un chansonnier qui souhaitait trouver de jeunes auteurs pour lui écrire des textes m'y a repéré.


D’un autre côté, je travaillais sur une autre radio où j’écrivais également des textes pour l’un ou l’autre animateur. En parcourant les pages d'un journal, je tombe sur une annonce d'un présentateur à succès qui lance une émission et cherche de nouveaux chroniqueurs. C’est une vitrine pour moi. J’y suis repéré et je commence à me faire connaître. A partir de ce moment, je ne suis plus l’auteur caché, le nègre d’autres.


Pourtant, j’espèrais toujours trouver ma place à la radio, parce que c'était elle qui m’avait sauvé. J’espèrais pouvoir toucher les auditeurs de l’autre côté du transistor, d’autres personnes à qui je remonterais le moral pendant quelques heures, ou pendant toute une vie.


J'ai rencontré un producteur par après qui a cru en moi et m’a emmené dans ses émissions de télévision. Moi qui ne pensais déjà pas avoir de voix pour la radio, montrer ma tronche à la télévision, vous y croyez-vous ?


Certaines des émissions sur lesquelles j'ai bossé ont été de profonds échecs. Je me suis bien planté sur la chaîne numéro 1 auprès de la ménagère. Mais les échecs m’ont obligé à me remettre en question. Aurai-je vécu ce rêve sans mes échecs ?


Il y a quelques années, j’ai repris les rênes d’une émission à grande écoute qui a bercé mon enfance, et qui était une des émissions phares que je réinventais le soir dans mon lit. Je tranchais par rapport au ton donné par l’ancien animateur et je me suis pris pas mal de commentaires méchants dans la poire. J’aurais pu laisser tomber, m’en aller, déchirer le contrat qui me liait à cette émission mais je me suis focalisé sur les commentaires positifs et je suis allé de l’avant.

Avec le temps, j'ai compris que j’aime la solitude, mais aussi être entouré. J’aime avant tout rire et faire rire. J’aime écrire pour moi ou pour d’autres.


Certains m'ont aidé sur ma route. J'aime me souvenir d'eux. Et lorsqu'une de ces personnes sont au plus bas, je leur tends la main en retour pour reconstituer avec un de ses amis, le duo de mon enfance.


Le public aussi demande fidélité et ne comprend pas qu’on puisse s’intéresser à d’autres défis. J’ai permis à certains qui avaient disparus aux yeux de leur public de remonter sur scène.


J'ai toujours été l’artisan de mes émissions, de mes textes. Ma réussite, je la dois à mon travail, à des rencontres, à des moments. J’ai jeté des bouteilles à la mer et eu la chance que certaines arrivent sur la bonne plage, découvertes par les bonnes personnes.


Finalement, moi qui rêvais de radio, j’ai parcouru tellement d'autres voix.

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