Les récits de cette collection s'inspirent des entretiens passionnants menés par @Charlotte Desrosiers Natral dans son podcast 'Pourquoi pas moi?', podcast que vous pouvez retrouver ici.
@PourquoiPasMoi-Lepodcast vous offre des #interviewsinspirantes où des personnes qui ont un jour rêvé changer de vie, ont osé écouter leur petite voix pour franchir le pas.
Je remercie Charlotte de m'avoir donné l'autorisation de m'inspirer de ses entretiens.
Le récit posté ci-dessous s'inspire librement de l'entretien mené par Charlotte avec Laurent Regairaz. Si vous désirez écouter cet entretien, vous pouvez le retrouver ici
A chaque fois que je dois monter sur scène, c’est la même chose. Je ressens un trac fou. Aujourd’hui, j'ai des moyens qui me conviennent pour que cette montée d’adrénaline laisse place à la joie de retrouver mon public, de vous retrouver.
A vrai dire, ça marche plutôt pas mal pour moi. Pourtant, rien ne me prédisposait à cela. Quand je repense aux études entamées pour devenir notaire; rien ne me prédisposait à être devant vous ce soir. Oui, parce que notaire, ça pose un homme. Là où pour mon frère, c'était inné, pour moi, ce n’était pas gagné. Pour certains, j’étais juste bon à nettoyer les cabinets.
Alors, j'ai bifurqué et je me suis engagé comme juriste dans différentes boîtes. C’était plutôt sympa mais je ne peux pas dire que ça m’enthousiasmait plus que ça. Je maitrisais mon métier, mes dossiers, mais je ne me sentais pas à ma place. Je m'esquintais au quotidien à donner le change, j’allais au bout des choses. Pourtant, j’étais convaincu que le parfum de l’imposture se reniflait à des kilomètres à la ronde.
A un moment, j’ai commencé à cogiter. A me rappeler ce qui m’amusait dans ma jeunesse. Faire des blagues, faire le clown, faire rire les autres. J'avais découvert le pouvoir du rire auprès de ma mère. Et comme je ne pouvais pas jouer sur mon physique ou sur mon côté introverti pour intégrer une bande ou faire tomber les filles, j'usais du rire pour ouvrir les portes.
Pour tout vous dire, en fin de jeunesse, nous avions monté spectacles et vidéos avec quelques potes. Nous avions même rencontré quelques succès. Une vidéo envoyée sur la chaine cryptée nous avait mis en avant. Pas bien grand-chose, quelques bricoles reçues. Mais, j’avais pris goût à faire rire tant de personnes.
Est-ce pour cela que j’ai voulu y regoûter au moment où je ne me retrouvais plus dans mon boulot ? Oh, sans doute. Alors, j’ai balancé des vidéos sur les réseaux sociaux sans me rendre compte qu’elles mettaient à mal mon image de l’époque et qu’elles auraient pu me coûter bien plus cher. Parce que je me moquais allégrement des personnes qui faisaient le même métier que moi, en utilisant l’adresse de la société qui m’employait. Me moquer des collègues et des patrons, passe encore, mais en utilisant leur nom, c’est plus difficile. La porte, je l’ai trouvée rapidement. La direction me l’a montrée du doigt.
Pourtant, à la maison, pas de déprime, le sourire plutôt. Ce qui surprenait ma femme. J’étais viré, sans solution de replis, c'était chaud pour l’orgueil mais je me sentais bien.
Et puis j'ai osé une nouvelle vidéo, celle qui m’a permis de claquer au visage de beaucoup et de me faire connaître. Une vidéo dans laquelle je donnais tout ce que je pouvais. Cette vidéo, bricolée en allant chercher du pain, assis dans la bagnole, a créé mon personnage.
Je vivotais, néanmoins je devais aussi continuer à apporter ma contribution à la marmite familiale. Je crois que le jour où ma femme m’a mis un ultimatum, j'ai compris que je n’avais plus le choix. C’était réussir ou rentrer dans le rang. J’ai pu compter sur quelques relations pour monter sur les tréteaux. Ce qui m'a conduit à faire de la radio. J’ai aussi gouté aux chroniques, aux bides, aux gouffres. Néanmoins, certaines ont fonctionné et j’en ai ressenti quelques instants de fierté. J’avais toujours rêvé de cinéma, et j'ai participé à un film. Être acteur, porter un costume qui n’est pas le mien et pouvoir l’enlever à la sortie de scène.
Mon public le plus difficile, je le trouve chaque jour à la maison. Ma gamine me retourne cash quand je ne la fais par rire. En outre, elle n’hésite pas à me rappeler que je ne suis encore qu’un débutant. Que je n’ai que quelques milliers de vues sur la toile. Que je suis encore loin des millions.
Je prends ce qu’on me donne, je profite et si je souffre, je change de créneau. Parce que si je souffre, c’est que je ne suis pas au bon endroit. Je ne cherche pas le bonheur. Ça m’ennuie le bonheur, ça me gonfle le bonheur.
Enfin, ça marche plutôt bien pour moi aujourd’hui. Ma femme est à mes côtés. Elle me conseille, elle me suit, elle gère les affaires et je sais que je peux compter sur elle. Chaque soir, je monte sur scène et je me lance, comme si je sautais en parachute, la trouille au ventre, parce que quand je me plante, c’est douloureux, mais quand je plais et que j’atterris sans encombre, dès le lendemain, je retente l’expérience.
Prendre ce risque, c’est enivrant. J’y ai sans aucun doute perdu la tranquillité d’un CDI. J’y ai perdu la faculté de pouvoir anticiper les choses et de savoir où me mène le chemin.
Mais je me suis écouté et je me sens vivant. Je souhaite continuer à entretenir cette flamme qui brûle en moi. Je me connais, je bosse, j’ai du talent, j’ai la passion de ce métier. Je fais rire les autres et ça me fait vibrer tous les jours.
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